vendredi 4 avril 2014

Les Mines d'Ahouli-Mibladen- Le revers de la médaille: La silicose.


La silicose est une maladie pulmonaire qui se développe à la suite d'inhalation de particules de silice dans les fonds des mines, et aussi, dans d'autres métiers (les sableurs, les ouvriers en céramique etc..).
C'est une maladie professionnelle irréversible.

 Les symptômes de la maladie :
- Insuffisance respiratoire se traduisant par un essoufflement au moindre effort se compliquant de pneumopathies à répétition et souvent de tuberculose pleuro-pulmonaire et, à la longue d'une insuffisance cardiaque et pouvant être le lit d'un cancer pulmonaire.

La radiographie pulmonaire permet de porter le diagnostic en mettant en évidence des opacités rondes disséminés dans les deux champs pulmonaires.

La silicose se développe après l'exposition  à la poussière de silice après plusieurs années. Il existe des formes accélérées après l'exposition de quelques mois. Le seul traitement de la silicose est la transplantation pulmonaire. La prévention reste le moyen le plus efficace contre cette maladie incurable.

Au moment de l'exploitation minière à Mibladen- Ahouli, les moyens de prévention étaient inexistants, ce qui fait que le nombre de silicotiques et de décès par la maladie étaient considérables.

Aujourd'hui, pour diminuer la prédominance de cette maladie, la médecine de travail impose les mesures suivantes: limiter l'exposition à la silice, diminuer l'empoussièrage par l'aération et l'installation d'un aspirateur sur l'outil de travail.

La France ne reconnait la silicose comme maladie professionnelle qu'en 1945. A Midelt , la direction des mines d'Aouli-Mibladen attribuait la symptomatologie pulmonaire constatée chez les ouvriers à la tuberculose .Il a fallu la défensive du Dr Louis Tonellot pour reconnaître qu'il s'agissait d'une maladie professionnelle; la silicose:
 Voilà son témoignage tiré de sa brève monographie qui m'a été adressée par mon grand ami Dr Maxime Rousselle.

 " En 1947, les servitudes de ma profession m'amenèrent à prendre un poste à Midelt où je devais rester jusqu'en 1953, à une vingtaine de kilomètres environs, se trouvaient les mines d'Aouli. Dans le cadre de mes consultations, je fus amené à examiner d'anciens ouvriers. Je ne pus que constater d'indéniables affections pulmonaires. Niant l'évidence avec une mauvaise foie consommée, les cadres de la mine assuraient qu'il s'agissait là de cas de tuberculose. N'étant pas d'accord, je sollicitais l'avis des spécialistes, lesquels confirmèrent sans hésitation ce que je pensais; à savoir que nous avions belle et bien affaire à des cas de silicose. Un problème de taille se posait bien évidemment, car cette affection en ce temps là, n'était pas reconnu officiellement au Maroc. Et les dirigeants de la mine, comme on peut s'en douter, n'avaient aucun intérêt à ce qu'il le fut.
Face à ma détermination, à vouloir imposer la vérité sur cette question, proposition me fut faite, d'être muté sur un poste de choix. Inutile de dire que je refusais de la manière la plus catégorique et je n'acceptais mon déplacement que lorsque le diagnostic que j'avais établi fut finalement confirmé en 1953, entraînant la reconnaissance officielle de cette maladie."

Je tiens à rendre un  hommage posthume à la détermination de ce grand médecin pour le service énorme qu'il a rendu aux nombreux ouvriers atteints par cette maladie.


dimanche 16 mars 2014

Midelt- Pariez gros sur cette ville!


Après la fermeture définitive des mines d'Aouli, Mibladen et Zaida en 1985, la ville de Midelt glissa tout doucement vers un marasme économique grave. La petite ville n'a pas su préserver l'élan de dynamisme et de modernité qu'il a eu la chance d'acquérir au moment de l'exploitation de ses gisements de plomb. "Le plomb ne s'est pas mué en or".

Les mideltis se sentaient abandonnés. Pendant des décennies, la ville dégageait un acre parfum d'ennui et de poussière. L'agonie touchait tous les domaines. Plus de 300 habitations étaient en vente après la fermeture des mines. Les constructions stagnaient. Plusieurs commerces fermaient.

Le mètre carré de terrain se vendait à des prix dérisoires. Les infrastructures de base manquaient, l'assainissement ne touchait pas tous les quartiers de la ville. L'électricité n'était pas généralisée et tous les habitants ne bénéficiaient pas de l'eau potable. Le BMH recensait au centre de la ville, en cette période, plus de 120 puits qu'elle traitait à l'eau de javel afin d'éviter les maladies hydriques fréquentes.

La ville comptait de nombreux retraités des mines dans la grande majorité était atteints de la maladie professionnelle contractée au fond des mines: la silicose.
Chez les jeunes, le déseuvrement tenait lieu de philosophie. La majorité passait la journée aux terrasses des cafés maures. Le seul sport qu'ils pratiquaient était le chuchotement des secrets. On savait tout de chacun et tout de suite. " Un gramme de benjoin suffisait à encenser toute la ville."

Les vieux déçus de la situation catastrophique de leur ville ne cessaient de répéter les mots qu'ils attribuaient à Abderrahmane El Majdoub et que Mme Amina Aouchar a attribué à une chef de tribu qui avait nomadisé dans la région il y a quelques sciècles:
" Sir a blad outat,
 Allah ijâal bladek rih
ou rbiâak chih,
 oulli fik âamrou mayrih!"

" Oh pays d'Outat,
que Dieu fasse que ta terre ne soit que vent,
que ton herbe ne soit qu'armoise
et que tes habitants ne trouvent jamais de repos!"

Les optimistes, eux, s'attendaient au changement de leur ville, ils disaient que "Midelt n'attendait que son homme". Ces derniers ont gagné. Son homme est arrivé. Depuis que sa Majesté le Roi, que Dieu l'assiste, a fait son entrée officielle à Midelt en 2009,
La chiquenaude tant attendue a eu lieu. Cette honorable visite royale a mis notre ville sur les rails du développement. Midelt est aujourd'hui un chantier ouvert, des projets de grande envergure, dans presque tous les domaines y voient le jour. La ville sort désormais de son agonie. C'est une ville qui a beaucoup d'avenir .

Pariez Gros sur Midelt! Pariez sans crainte! C'est une ville qui monte

samedi 8 mars 2014

Hommage à toutes les femmes!

A l'occasion de la journée de la femme, je tiens à partager avec les lecteurs du blog, ce billet traçant le portrait d'une femme amazigh de la haute moulouya orientale. Portrait tiré de ma fiction " le monde de Aicha Bassou"

.....Mes Amis, vous allez faire connaissance, ce soir, d’une campagnarde dont tout le monde loue la sagesse. J’ai entendu parler d’Aicha Bassou depuis mon plus jeune âge sa renommée dépasse les frontières de sa tribu. Elle est ici comme l’Amghar* de l’endroit très écoutée par la population......

......Mes parents étaient des gens comme on en fait plus, tous les deux d’une forte carrure. Une sélection de la nature. J’étais la troisième d’une fratrie de cinq enfants, un garçon et quatre filles, sans compter les enfants morts nés.

Mon père était passé maitre dans l’art de cultiver les champs et de s’occuper de l’écurie. Il cultivait lui même ses terres, donnait à manger aux bêtes. Il buvait le lait de ses chèvres et on ne l’avait jamais vu aller au souk avec un sac sur l’épaule pour acheter le blé. Il entretenait avec beaucoup de zèle son cheval, c’était sa fierté. Il faisait partie des valeureux cavaliers de la tribu.
Aicha Bassou se plaisait à évoquer cette époque. Elle continua : Après le décès accidentel de mon frère et le mariage de toutes mes sœurs, mon père me consacra tout son temps libre. Jamais il ne revenait des champs ou de la forêt sans s’informer d’abord à mon sujet. Il m’avait appris, que Dieu ait son âme, à marchander au souk, à m'occuper de l’élevage des ovins, à manier le fusil "Bouchfer" avec dextérité. Il avait fait de moi une cavalière hors pair. Il m’avait appris à rivaliser avec les meilleurs cavaliers de la région. J’avais participé à des fantasias régionales, à Tizi N’Imneyn chez les Ait Ayach et à Igr N’Jamaâ à Aghbala, chez les Ait Soukhman. Dans Tassrebt (l’équipe de cavaliers) des Ait Bassou, il y avait toujours à côté de moi mon futur mari, le père d’Ali. Nous étions jeunes et beaux, j’avais à cette période l’âge de Tasekourt. J’avais moi aussi, la même taille fine à cet âge, les mêmes cheveux châtains et la même ardeur de vivre.

Aicha marqua une pause et soupira profondément avant de continuer : mon père n’avait jamais fait de différence entre les garçons et les filles. J'ai appris avec lui à m’imposer à la gent masculine.

Quant à ma mère, elle me chérissait également, elle avait fait de moi la fille laborieuse :Tamhrouchte*, une experte en matière de travaux ménager et ceux de la laine. «  J’ai eu leur bénédiction, que Dieu ait leur âme!