vendredi 27 janvier 2012

ADIEU ROUI…CHA*, REPOSE EN PAIX Par Salah Abdelmoumen


Je ne saurai dire si avec ma plume aussi acérée soit elle, en transcrivant quelques gallicismes placés bout à bout plus ou moins adroitement, je pourrai rendre hommage à ce grand homme, à Rouicha l’unique, l’incomparable. Mais je supplicierais le verbe sans hésitation, en guise de reconnaissance, pour parler de cet être fabuleux et affable, humble et courtois.

Cet homme qui a su pendant de longues années faire vibrer à travers son timbre de voix et son « Raghoul » la corde de l’espoir dans les cœurs meurtris de ses auditeurs les rendant complètement ralliés à sa cause.
Ce fut l’un des rares chanteurs à avoir fait l’unanimité chez le public Marocain qu’il soit arabophone ou berbérophone. Il avait un don du ciel depuis son jeune âge et bien vite tous les jeunes de son époque, n’ayant pas résisté à l’attrait de sa musique, l’ont pour la plupart adopté définitivement et nombreux d’entre eux se sont mis sur ses traces en imparfaits imitateurs. Moi-même, j’ai troqué mon luth dans le temps pour me convertir à l’Outar, cet instrument que Feu Mohamed Rouicha adulait et cajolait comme un enfant.

Cet instrument qui incarne la culture amazigh dans l’Atlas et qui risquait de tomber dans la désuétude renait de ses cendres grâce aux doigts en or du maitre et à son potentiel créatif inouï. Eh oui l’histoire se rappellera que cette sublime innovation du rajout de la quatrième corde qui lui est attribuée sans aucune contestation a permis à cet instrument de gagner ses titres de noblesses au point qu’il fut plus tard introduit dans de grands orchestres de musique classique au Maroc.

Mohamed Rouicha, l’empathique, le généreux est parti en laissant derrière lui un registre plein de chansons et de réalisations qui ont fait le bonheur de ses contemporains. Ses innombrables albums sont une richesse pour le patrimoine culturel marocain. Je me rappelle, sa maison et notamment un grand salon au rez-de-chaussée orné de tapis zaianis où il recevait ses visiteurs les bras ouverts et donnait sans compter. Il prodiguait conseils aux apprentis « outairis »  dont je faisais partie dans le temps sans la moindre réserve. Que Dieu l’accueille dans sa céleste demeure au milieu des sains musulmans de ce monde et qu’il le recouvre de sa miséricorde.
Que ses amis et inséparables « Mouloud ou Hammouch », Lahcen «dit el mouftil », Mustapha menni et bien d’autres ainsi que tous ses fans trouvent ici l’expression des mes sincères condoléances. Que ses enfants sachent que tous les marocains se joignent à eux dans cette douloureuse circonstance.

*ROUI..CHA : Concocte quelques choses (en berbère)

Salah ABDELMOUMENE- Rabat

dimanche 22 janvier 2012

FEU ROUICHA a trépassé pour allumer des brasiers ailleurs : Par Majid Blal


L'OUTAR EST TRISTE, L'OUTAR EST DEVENU ORPHELIN!

Feu Rouicha, tu avais allumé le brasier de la culture marocaine avec ton Outar et la lumière des étincelles risque de nous réconcilier avec nous mêmes!
Au-delà des gouts musicaux. Au-delà des clivages identitaires et des perceptions biaisées de certains modernismes qui refusent et méprisent l’authentique, il y a le constat de l’apport de Rouicha.

Au-delà des particularismes régionalistes, linguistiques, claniques, tribaux, il y a des marocains qui se reconnaissent dans leurs artistes qu’importent d’ou ils émergent. Quartier, montagne, plaine, ville, campagne…
Au-delà de ces complexées de l’histoire qui ne valorisent les leurs que s’il y a boomerang par le label occident et de la certification « Produit reconnu par les pays clinquants », il y a les connaisseurs de la trame marocaine.
Ce genre de sans personnalités qui ont attendu que le Jazz fasse du « Gnaoui » un genre respectable pour qu’ils l’adoptent dans leurs mœurs et lui donnent la stature dans leur appréciation, n'est souhaitable que comme exception.
Je n’impose rien ni culpabilise personne. Je constate que certains marocains ne reconnaissent la valeur de leur patrimoine que si l'occident leur en dit du bien, que si l’occident le leur dit…Je ne parle pas des gouts et des couleurs où chacun peut vaquer à sa guise...
Rouicha devrait être une icône de l’appartenance au pays des Atlas, un symbole exhibant un patrimoine dans le quel s’identifient toutes les composantes de la société.
Une fierté de tous les enfants de ce pays qui voient un chantre de la culture incarner leur Maroc pluriel. La spécificité de la phrase musicale de Rouicha empreinte de Marsaoui comme de plusieurs autres apports locaux, n’est que le fruit d’un mÉtissage en cours depuis si longtemps avec le reste de l’humanité
Rouicha n’est pas uniquement le chantre d’un genre musical ni d’une ethnie, ni du moyen et du haut Atlas. Il était l’aboutissement d’un combat pour se faire une place dans le cœur de tous.
Ce serait de mauvaise foie, malhonnête et surtout suffisant d’en faire uniquement le chantre de l’amazighité. Le représentant troubadour d’une partie de la population non citadine,… Penser ainsi c’est lui accoler un statut réducteur, lui concéder et le confiner dans une reconnaissance minimaliste, méprisante et méprisable.
Rouicha était autant à l’Outar que ce qu’était Ravi Shankar à la cithare. Comme ce dernier, Rouicha ne mérite pas plus qu’un statut national pour la dimension identitaire des marocains et un statut d'artiste universel pour la dimension musicale et culturelle.
Alors si vous êtes marocains(es), ne me dites pas Winekh ! Comme un clin d’œil complice et complaisant mais dites moi Winekh où vous êtes inclus(es) comme référence à un particularisme commun, qu’on met au service de l’universalisme.
Rouicha le symbole d’un Maroc qui veut se débarrasser des démons de l’essentialisation par la Musique.
Adieu Rouicha, on t’aimait bien
Salut l’Artiste, je t’aimais bien
Sherbrooke le 17 janvier 2012

mardi 17 janvier 2012

Mohamed ROUICHA n'est plus


C'est en ce mardi gris d'hiver, ce 17 Janvier 2012, que le grand artiste de l'Atlas Mohamed ROUICHA nous quitte à l'âge de 62 ans.
La disparition de ce grand chanteur marocain est une douloureuse épreuve pour son grand public, à l'intérieur et à l'extérieur du pays.

Ce grand spécialiste de l'Outar (instrument typiquement marocain), a eu une réussite dans le monde artistique de l'Atlas sans équivalent.
Avec sa voix ensorcelante, et le rythme envoûtant de son "outar", il a su se maintenir des décennies durant, en haut de l'affiche.

Le talent de Mohamed ROUICHA a été salué par tous les marocains, arabophones et berbérophones .
La fin de ROUICHA, que Dieu ait son âme, est également la fin d'une époque. La chanson amazigh, est désormais un peu orpheline.

Nous nous souviendrons de toi Si Mohamed, nous écouterons tes chansons aussi longtemps que nous vivrons

A Dieu nous sommes et à lui nous retournons.